Entretien avec Julie Massieu (Déclic Experts publics – Rennes), issue des collectivités locales, qui aide des entreprises à développer leur carnet de commande. Et les acheteurs publics à être plus efficaces.
Votre métier, c’est de mettre l’huile dans les rouages entre les collectivités et les entreprises. Quels sont les besoins ?
L’objectif est de gagner en efficacité dans la commande publique. J’ai constaté, dans mon expérience d’acheteur public et de membre de l’association Breizh small business act (*), que les acteurs sont séparés par un mur invisible : on parle souvent d’un code des marchés publics “trop rigide“. Tout texte juridique est perfectible, mais le problème c’est qu’il n’est pas assez appréhendé en tant qu’outil. Dès lors qu’on confie l’achat public ou la réponse à un appel d’offres à quelqu’un sans lui confier aucune clé, on rencontre des difficultés. Ce n’est pas une problématique de professionnalisme, c’est une problématique de professionnalisation. Il y a plus d’incompétence que de complot, ce n’est pas un jugement de valeur, c’est un constat. Est-ce que les dés sont pipés ? La plupart du temps, non. Dès lors qu’on est à Nantes Métropole ou à Rennes, il y a des gens dont c’est le métier. Mais dans 80 % des collectivités, il n’y a pas de personnes dédiées à cette fonction. C’est pour cette raison qu’il peut y avoir des incohérences.
Avec la commande publique, peut-on faire du circuit court ?
Le code des marchés publics interdit la discrimination à l’entrée. Par contre, il n’interdit pas de définir ses besoins et de définir l’intérêt d’aller des vers acteurs locaux. Dans la communication, il y a la problématique du « c’est toujours les agences parisiennes qui raflent la mise ». Pourquoi ? Parce que l’organisme public ne creuse pas assez son besoin. Si on cherche une proximité humaine en terme de communication et d’équipe, une adaptabilité du projet, il faut le formaliser dans le cahier des charges pour le valoriser dans la sélection. Sinon, c’est l’agence qui a le plus de références qui sera retenue. Donc, les circuits courts, on peut y travailler. C’est possible.
Pour gagner des marchés publics, quelle est la bonne méthode ?
Côté entreprises, les « primo-accédants » doivent s’interroger sur l’opportunité de se développer sur ce secteur. Il faut s’entourer d’experts, se former et définir une stratégie. Pas juste tester pour savoir si ça marche. Attaquer la commande publique, c’est un segment de clientèle à qualifier. Comme dans le secteur privé, on travaille son réseau. Je ne parle pas de lobbying mais de démarche commerciale. Dans la réforme du code des marchés publics, prévue pour avril 2016, il est écrit noir sur blanc que l’acheteur public est fortement invité à faire du sourcing pour renseigner son besoin. C’est un moyen pour les collectivités d’identifier et d’attirer les bons candidats. Ce qui veut dire aussi que les entreprises et leurs représentants interprofessionnels doivent se positionner clairement auprès des collectivités.
(*) : L’association Breizh small business act réunit des acteurs publics et privés autour des enjeux de l’achat public en Bretagne. Ses membres cherchent à faire bouger les lignes à travers une charte et un portail internet pour partager informations et bonnes pratiques.